Histoire de nos deux villages, coutumes et patrimoine.

Il est des villages en Lorraines, où les vieilles coutumes et les traditions ancestrales ne sont pas encore perdus dans les mémoires, c’est le cas du village de FAILLY. Situé non loin de METZ, bâti au bas d’un versant de l’un des vallons qui entame la surface du plateau lorrain à l’est de la Moselle, FAILLY fait partie de ce territoire du Pays messin au nord du Saulnois appelé le Haut-Chemin au Moyen-Age.

Ce village d’aspect modeste et paisible avait autrefois un rôle important. Pour y arriver de tout côté il faut descendre.

C’est le village des Queulots

Le nom Queulot est le sobriquet collectif donné aux habitants de cette localité, des villages et des annexes
voisines qui anciennement dépendaient de l’église-mère de Failly : Vrémy, Poixe, Servigny les Sainte Barbe,
Vany, Villers l’Orme, Augny-sous-Grimont.


Ce sont les Romains qui, en construisant à l’emplacement de Failly une ferme appelée Villa Fadilica donnèrent
naissance à ce qui plus tard deviendra un village.
 

Au moyen-âge :

Il y eut à Failly une commanderie de l’ordre de Malte et un château qui lui appartenait, aujourd’hui, on ne retrouve plus qu’une vieille tour à l’emplacement de ce château, cette commanderie occupait toute la partie
du village que les habitants appelaient en Cheu, en Chambre et qui représentait la partie basse de la commune,
cette dénomination existe toujours.

Failly entre ensuite en possession du chapitre de la cathédrale de Metz, à la disparition des templiers.


En 1293 la famille Bataille devient propriétaire d’une partie de Failly, l’autre fut donnée par l’évêché en tant
que fief à la famille Epinal. Failly conserva la seigneurie jusqu’au XVIe siècle, époque où elle fut acquise par la
famille protestante des Grassets qui ajoutaient à leur nom « de Failly » une autre partie fut acquise par les
Bénédictins.

La guerre de trente ans

Après ces périodes fertiles en constructions, la Guerre de Trente Ans s'abat sur la région. La forme des crânes et les
renseignements de l'histoire donnent à penser que dans le charnier découvert à Failly se trouveraient quelques milliers de ces Suédois qui ont déferlé en Lorraine à cette époque.

Le prochain fait historique que nous avons relevé est le cahier de doléances que Failly a écrit à l'époque de la Révolution :

- ne plus être obligés de donner les mares de raisins au seigneur.
- ne plus être obligés de tolérer le passage des chevaux et troupes du seigneur dans les champs ensemencés
- la réduction des jours de corvée dus au seigneur
- que les pigeons du seigneur ne causent plus de dommages aux récoltes.


Cependant, de mémoire d'homme, Failly n'a connu qu'une seule grande bataille et ce fut durant le siège de Metz au
début de la guerre de 1870. Failly alors investi par les Allemands fut attaqué à 3 reprises par la division française de Tixier, sans résultat.

 

L’architecture

Quelques maisons de Failly remontent au XVI e siècle. Les murs ont 2m de haut et 50 cm d’épaisseur et sont
fait de rocaille et de terre glaise. On y a retrouvé au-dessous de ces bases, des plaquettes de bois brulé, ce qui
laisserait supposer que le village a été partiellement ou totalement détruit vers 1635.

Il y a un peu plus de 150 ans, les maisons n’avaient en guise d’ouverture qu’une petite porte très étroite et une fenêtre de 12 pieds de large sur 18 pouces de haut avec un barreau de fer en double croix. Ce genre de constructions se retrouvait dans la plupart des villages du département, les maisons étaient serrées les unes contre les autres le long
d’une seule rue, cela était exigé pour la défense commune en cas d’invasion de quelque compagnie franche.

Voici comment on peut décrire une maison : 

Le grand toit soulevé, les murs éventrés, les planchers percés, la maison lorraine nous livre ses secrets. Elle est très profonde. Un long corridor dallé qui s'ouvre sur la rue et le jardin la partage en deux parties, l'une pour les gens, l'autre pour les bêtes. Le logis se compose de 3 pièces en enfilade : sur la rue la "belle chambre" ou "poêle" sur le jardin, "la chambre de derrière" ou "la chambre à four".

Entre les deux, la cuisine, pièce borgne prenant un jour parcimonieux sur les deux pièces contiguës par les portes vitrées, les petits carreaux d'un vitrage et par le grand trou de la cheminée, La plaque de fonte de cette cheminée ou "taque" chauffe la "belle chambre".

La partie réservée au bétail se divise elle aussi en trois parties : la grange avec sa grande porte à deux battants l'écurie et l’étable : toutes trois communiquant entreelles. Deux portes prenant sur le corridor permettent d'aller, de l'intérieur, voir vaches et chevaux. Une petite bâtisse s'ouvrant sur la cour est réservée aux porcs, Les poules rentrent chez elles par une petite échelle rustique et les chats se faufilent par la "chatière" dont le trou écorne un angle de la porte d'entrée, Logement des hommes et logement des bêtes sont recouverts par un immense grenier où sont entassés le foin, le blé, l'avoine et la paille qui constituent une chaude couverture qui protège les habitants de la maison contre le rude hiver.

À Failly les caves voûtées sont souvent extérieures à la maison.


Les usoirs

L’usoir a une surface importante : 6, 8 voire 10 mètres de largeur, de la façade de la maison à la rue. Il descend en
pente douce vers la rue avec, en bas, un caniveau pour l’écoulement des eaux de ruissellement. Les villageois
l’utilisaient pour, stocker la provision de bois de chauffage pour l’hiver, ranger le petit matériel agricole servant à
travailler la terre : brouette, charrue, entasser le fumier, plus ou moins volumineux en fonction de l’importance du
cheptel. Curieusement, l’usoir était un signe ostentatoire de richesse.


Le vignoble

En 1884, il y avait au village 43 ha de vignes. En 1908 le phylloxera les détruits, mais elles sont replantées dans les mêmes proportions. A cette époque Metz était la ville de garnison la plus importante d’Europe, 10 000 hommes de troupe qui consommaient du vin. Puis la vigne enregistre un déclin dû peut-être au manque de bras et à la concurrence.

Aujourd'hui, seul deux vignes restent sur la commune, terrain de jeu de deux passionnés soucieux de la sauvegarde de
notre patrimoine et du savoir-faire de nos anciens.
Dans les années 70 la moitié des habitants vivait encore de la culture et de l'élevage. L'autre moitié était composée
d'ouvriers ou cadres d'usines travaillant dans les centres sidérurgiques du bassin minier lorrain et de personnes
employées dans diverses administrations ou maisons privées de l'agglomération messine. Et deux artisans subsistaient
encore à Failly, un garagiste, mécanicien maréchal-ferrant et un menuisier-ébéniste.

 

L’église


De nos jours, l'église occupe avec le presbytère le point le plus élevé du village, Le mur actuel de cimetière, crénelé jadis, servait d'enceinte à cette forteresse religieuse

Dans le chœur de style ogival du XVe siècle, la fenêtre centrale possède un tableau de couleur où l'on voit la présentation de St Trudon par son père à Cléodulphe, évêque de Metz qui le soumet à de rudes épreuves. St Trudon est le patron de la paroisse. 

Au XVIIIe siècle, le nombre de fidèles était devenu considérable, on avait donc construit une tribune à l'église qui est devenue plus tard un sujet de scandale. M. Auburtin, homme de mérite, nommé curé de Failly ne fut pas peu surpris de voir les jeunes gens pendant les offices, assis à la tribune comme sur les bancs d'un cabaret, jouer aux cartes, boire, lancer des noyaux de fruits et même desbillets doux aux filles du village. Il fit venir en secret trois charpentiers qui démolirent cette tribune, mais le fracas épouvantable qu'elle fit en tombant alerta l'opinion. Le curé fut assiégé dans son église, un véritable blocus s'organisa et ce ne fut que grâce à l'intervention du curé archiprêtre d'Argancy que les esprits se calmèrent.


Monuments

Au XVe siècle ont été érigées par Messire Nicolas Louve, 5 croix aux limites du Ban de la Cité de Metz. Celle des "Trois Jambes", ou "croix de Louve" bien connue par ici, se trouvait à Villers l'Orme (paroisse de Failly), érigée en 1445 et est classée monument historique depuis 1896. Elle servait jadis de station pour les personnes qui entreprenaient le
pèlerinage autrefois célèbre de Ste Barbe. Les jeunes filles nubiles et les femmes stériles y venaient consulter l'oracle en jetant des galets plats sur le toit du monument jusqu'à ce qu'une pierre y soit posée. Le nombre de galets utilisés à cette fin indique le nombre d'années qui s'écouleront Jusqu’au mariage ou bien jusqu'à la maternité espérée. Cette coutume s'est encore pratiquée à l’occasion des pèlerinages à la chapelle de Notre Dame de la Salette à Villers l'Orme.

 On dit que le voyageur nocturne entendait parfois près des Trois Jambes le murmure des prières ou le chant infiniment doux des âmes errantes. Ceci n'est sans doute pas étranger au fait qu'on y pendait les gens (il y avait d'ailleurs un crochet à cet effet fixé à l'intérieur). La croix étant placée au bord de la route de Bouzonville : le Haut Chemin, était l'endroit idéal. On pense que c'était le lieu de "justice" du château de Grimont. 

C'est aussi aux pieds de ce monument que la légende fait s'arrêter un temps le juif errant avant de continuer sa marche sempiternelle. La croix à trois jambes a depuis été remontée au carrefour de la Salette.

 

Les calvaires

Ils sont au nombre de 8. 3 le long de la route de Bouzonville 2 dans le village de Failly 2 dans celui de Vrémy et 1 le plus récent sur le chemin derrière l’ancienne voie ferrée côté Charly Oradour.

 

Cimetière militaire Franco-Prussien 1870-1871

A proximité de l'église Saint-Trudon Le monument au carré Français est une stèle en pierre de Jaumont en forme
d'obélisque orné d'une couronne de feuilles en bas-relief. La tombe est de pierre de Jaumont surmonté d'une croix latine.

 

Groupe de tombes de quatre officiers allemands du régiment de grenadiers Prince héritier.


Ce monument funéraire se situe entre Servigny et Failly derrière le repli de terrain que constitue le RD 3, le Haut-Chemin. Il s’agit de trois tombes distinctes regroupées en un monument unique. Sont enterrés ici trois gradés de l’armée royale de Prusse. 

Tombe de droite, capitaine von Gersdorff, décoré́de l’ordre du roi de Prusse "Pour le mérite".

Tombe du milieu: le capitaine Bernhard Walden, originaire de Westphalie, de la petite ville de Holte.

Tombe de gauche: le seul monument à n’être pas une croix chrétienne. Inscription sur le monument: "Ci-gît, à côté de ses camarades, mon époux que je ne pourrai oublier, le lieutenant de l’armée du roi de Prusse, Dr Phil. (Docteur en philosophie) Eugen Lehmann, né le 31 mars 1844. jeune universitaire de 26 ans, Docteur en philosophie à l’université́de Königsberg. C’est sa femme qui a fait ériger ce monument pour lequel elle n’a pas choisi la traditionnelle croix chrétienne mais une colonne grecque tronquée, symbolisant à la fois une jeunesse brisée trop tôt et un esprit libre.

De 1870 à 1914 les années d’annexion et le chemin de fer.

Il faut attendre 1898 pour que différents tracés concernant la ligne Metz-Vigy-Anzeling soient enfin étudiés. C'est en 1902 que le réseau Elsass-Lothringen (E.L) prend position sur le tracé définitif, mettant ainsi en place une nouvelle relation directe avec l'Allemagne.

Les installations de gares sont prévues pour le mouvement de troupes (quais militaires hauts et vastes), l'alimentation en eau des machines est prévue pour assurer la circulation de 30 trains militaires par jour et par sens.

De 1908 à 1944, le village de Failly était traversé par l'un des plus grands virages ferroviaires de France. Ce pont courbé mesurait 574 mètres et sa structure métallique de 6500 tonnes traversait la vallée à plus de 34 mètres de hauteur. Il était, à l'époque de sa construction, l'un des viaducs les plus importants du réseau allemand. On peut encore voire aujourd'hui les restes des piliers des deux côtés à l'entrée de Failly.

Au sud, ce viaduc aboutissait à un tunnel qui existe encore et passe sous la Route de Bouzonville.
Creusé dans du calcaire du bas jurassien, il mesure 770 mètres avec une hauteur maximale sous voûte de 25 mètres.
Ce tunnel fut souvent utilisé pour abriter les convois des hauts dignitaires allemands en visite dans la région. Hitler y a
passé au moins une nuit.
Le 25 mars 1908, jour de l’inauguration, le train partie de Metz à 9 h. s'était arrêté dans chaque gare où les populations lui avaient offert un accueil chaleureux. La gare de Failly, a été l'un de ces lieux où se sont déroulées des cérémonies
inaugurales.
Discours de M. Harter, le maire de Failly : souhaite, en ces termes la bienvenue à M. le comte de Zeppelin.
(Monsieur le Président, C'est avec une joie et une satisfaction toutes particulières que j'ai l'honneur de saluer en vous le représentant du gouvernement impérial de la Lorraine.
En ce jour de l'inauguration de la nouvelle ligne Metz-Vigy-Anzeling, je tiens à vous exprimer hautement les remerciements de toute la population de la commune pour le bienfait d'une ligne de chemin de fer et la construction d'une halte pour la commune de Failly.
Dans le courant de l'année 1907, nous avons demandé une voie de garage.
Si cette chose ne nous est pas accordée maintenant, nous espérons qu'elle nous sera accordée plus tard, quand le chemin d'accès à la gare sera construit et que le besoin s'en fera sentir davantage.
Pour le moment, nous remercions de tout notre cœur le gouvernement impérial de tout ce qui a été fait pour notre bien à tous. Messieurs, veuillez, vous associer à ma reconnaissance en poussant avec moi un triple vivat en l'honneur de M. le Président de la Lorraine.

Cette ligne a surtout été réalisée pour constituer, la liaison la plus courte possible entre la Prusse et Metz, bouclier du
Reich. Elle avait en fait trois objectifs : resserrer les liens entre les régions annexées et Berlin, augmenter les relations
avec la ville de Metz et transporter le minerai lorrain vers les forges sarroises. Outre Metz et Failly, la voie ferrée desservait les communes d'Anzeling, Piblange, Saint-Hubert, Bettelainville, Vigy, Sanry- lès-Vigy, Nouilly et Vantoux. Le viaduc de Failly a été entièrement détruit lors de la retraite allemande, le 17 novembre 1944 à 13 h 30. Dès l'approche des troupes américaines, les autorités militaires allemandes ont donné l'ordre de détruire l'ouvrage.


Les canons

A Failly, de chaque côté du monument aux morts dominé par la statue de Jeanne D’Arc, trône deux canons de campagne allemand model 7,7 cm FK 16. Récupérés après la grande guerre sur le parc d’artillerie de Metz sur l’îles du Saulcy, par le Maire de l’époque le 26 février 1921. Ils ont échappé de justesse à une destruction certaine voire au mieux à une transformation en machine agricole ou autres, comme c’était souvent le cas en ces temps où la matière première se faisait rare.


L’autoroute

C’est en 1976 que les travaux de l’autoroute A 4 Paris Strasbourg ont commencé à Failly, des travaux conséquents ont
transformés définitivement notre vallée, avec un remblai de 30 m qui la coupe dans un axe nord sud et qui accentue
considérablement le confinement du village dans une cuvette.

L’impact visuel est perceptible jusqu’à Vrémy et n’est pas sans rappeler l’ancienne ligne de chemin de fer et son viaduc sensiblement au même endroit. Initialement conçu en 2 fois 2 voies elle est passée à 2 fois 3 voies depuis le 31 aout 2023. C’est à ce moment qu’elle a été surmontée d’un aménagement acoustique qui a fait l’objet d’âpres discutions en son temps.
L’arrivée de l’autoroute a été très impactante pour notre commune, outre le fait qu’elle occupe 22 hectares de notre ban, la route du village côté Vany a été déplacé dans le versant sud pour accéder à un pont qui a une largeur standard entre déblai et remblai, rongeant ainsi encore un espace foncier important des deux côtés.

 

Traditions :

Les Trimazo

Même si l’histoire contemporaine a pu bouleverser quelque peu les habitudes, il semble néanmoins que les habitants de Failly ont, de par la tradition, été de tous temps besogneux de leurs plaisirs.

Les usages de Failly remontent tous à la plus haute antiquité mais il n'en est peut- être pas de plus anciens que ceux des trimazos qu'on croit d'époque romaine et qui peuvent bien dater d'une époque antérieure. En Lorraine, le 30 avril, les amants attachent à la porte et aux fenêtres de leurs belles, de grands rameaux de hêtre couverts de fleurs trophées d'amour, appelés Mayen, mois de mai, moi consacré au beau sexe ainsi qu'à l'amour. Le lendemain presque toutes les jeunes filles des communes attroupées et vêtues de blanc avec des fleurs dans les cheveux, des rubans croisés sur le corsage de leur robe font une danse et quittent le village pour parcourir la campagne. Elles chantent des trimazos devant les portes des personnes distinguées. A Failly, les jeunes filles donnaient un repas aux garçons lequel se terminait par des trimazos.


Le Queulot :

La légende dit, qu’avant la date mémorable de 1444, les habitants de Failly filaient, en hiver, la récolte de lin de la saison passée pour en faire des draps ou des chemises. Avant de le mettre en écheveaux, elles lavaient ce lin dans les mares qui existaient autour du village.

A proximité du château de Failly où résidait le seigneur du village, il y avait trois mares infestées de grenouilles et de
crapauds qui, lorsqu'ils coassaient, gênaient celui-ci dans son sommeil. Un jour, apercevant depuis ses fenêtres les
paysans tremper leurs draps dans les petites étendues d'eau dormante, le seigneur eut une idée. "Pourquoi les braves
personnes qui viennent laver leur lin dans mes mares, ne viendraient-elles pas aussi la nuit pour faire taire ces batraciens agaçants ?"

Il lui fallut désigner quelques-uns de ses sujets pour accomplir cette besogne. Il convoqua sur le champ tous les jeunes
hommes mariés dans l'année. Il les fit munir d'un bâton à l'extrémité duquel était fixée une touffe de lin, et leur assigna la tâche de faire garder le silence à ces bestioles insociables. Ainsi toutes les nuits les hommes de corvée battaient l'eau jusqu'au matin afin de favoriser le repos du châtelain.

Mais un jour de l'an de grâce 1444, ce dernier vint à mourir. Pour fêter la délivrance d'un tel tyran, les jeunes mariés
firent un banquet. On dut nommer deux organisateurs. Ceux-ci auraient la charge de préparer les festivités. Ce festin se passerait tous les ans à la même époque et les préparateurs changeraient d'année en année, les anciens nommeraient les nouveaux. Plus tard on leur donna un nom : L'un s'appellerait "queulot", l'autre "mare de Châty".

Ceci est une version de l'origine de la coutume du "queulot". Le déroulement tel que nous allons le présenter, est en
partie inspiré par le docteur de Westphalen.

Le queulot est choisi parmi les jeunes mariés de la paroisse. Son élection a lieu chaque année. Jamais un queulot n'est
décédé pendant le temps que dure son administration, et, s'il venait à mourir, la coutume disparaîtrait avec le défunt. En 1836, un jeune homme succombant à une tuberculose pulmonaire reprocha à sa femme de l'avoir empêché d'être
queulot et d'avoir ainsi avancé d'une année au moins le jour de sa mort. Le même cas s'est présenté en 1867. Le queulot est toujours en compagnie d'un autre personnage, le Mare de Châty (sans doute anciennement le maire, maître ou roi des chétifs, de la châtiveté). Ce mare de châty est pour ainsi dire le chef de la confrérie des Queulots, le maître des réjouissances, et c'est à lui qu'incombe le soir d'imposer le respect dû à la coutume. Il est lui aussi choisi parmi les jeunes mariés de la paroisse.

Le costume du queulot se compose d'un habit à longs pans garnis de gros boutons, d'un gilet à l'ancienne mode à deux rangées de boutons de fantaisie, d'une culotte, de bas blancs ou de couleur, de souliers à boucle ou parés de flochets, un foulard enroule le haut-col et forme sur le devant un grand flot. Le long chapeau pointu est orné à son sommet d'un bouquet de laurier-sauce que retiennent d'énormes rubans de couleur qui donnent l'aspect d'une crinière, trois ou quatre couronnes de rubans sont étagées le long du cône de paille, et presque toujours plusieurs "choux" ou "roses" plaqués sur la face antérieure du chapeau achèvent l'ornement. Un solide cordon attaché de chaque côté de cette coiffe sert à l'assujettir et se noue sous le menton. Cette mentonnière est masquée par une autre à larges rubans, laquelle se termine par un beau nœud large. Autrefois le costume était mi-parti vert et rouge ou jaune.

Celui du Mare de Châty, plus sobre, se compose d'une blouse trois quart bleue, d'un pantalon, les chaussures et le
chapeau sont identiques à ceux du queulot. En outre le mare de châty est ceint d'une écharpe. Le jour du mardi-gras, le Queulot porte parfois lui aussi une écharpe.
Le queulot est muni d'un long bâton au bout duquel flotte un torchon ou une touffe de chanvre, le mare de châty lui,
tient la palate, sorte d'Hallebarde. Le bas du fer se termine par un quillon recourbé en crochet de chaque côté. Ce quillon est d'origine moderne, on y lit les chiffres 14-44. Sur la lance, on trouve quelques traces de chiffres. D'après la revue messine d'Austrasie, on lisait 1544

La veille du dimanche gras, après le souper, les filles de Failly se rassemblent chez le Queulot "po fare la chèpè don
Queulot" (pour faire le chapeau du Queulot). Ce travail achevé, les garçons du village viennent se joindre aux filles et on "arrose" le chapeau en se divertissant et en buvant maintes rasades de bon vin.
Le dimanche gras, après les vêpres, les paroissiens et étrangers venus des villages voisins et de la ville attendent le
queulot sur la place de l'église. Soudain il sort d'une habitation accompagné du mare de châty et tout le monde de s'écrier
: Queulot ! Queulot ! A cet appel le Queulot accourt, trempe sa queule dans la boue ou le purin, l'agite et s'élance à la
poursuite des spectateurs qui prennent plaisir à fuir son approche. Chaque personne que le Queulot rejoint est maculée au bas de la robe ou du pantalon. Ce rite dit-on porte bonheur. Aussi, cette souillure est généralement acceptée de bonne grâce, et les villageois ont soin de revêtir pour la circonstance des vêtements usagés, d'autant plus qu'il arrive que le Queulot ne ménage pas ses coups de queule, surtout aux personnes récalcitrantes.

Le Queulot pénètre aussi dans les habitations et cherche à y découvrir les personnes cachées dans quelque coin obscur. Sur la place du village il y a bal, et bien souvent les joyeux couples de danseurs ont droit à un petit coup de queule.
Le "queulot" terminé, le queulot peut prendre du repos. Il s'empresse d'aller vider en compagnie du mare de châty et de
ses amis quelques ("creuquats" (cruchon) de vin et de nombreuses bouteilles de clairet. On se raconte les petits incidents vécus pendant le "Queulot" et on vient à parler des jeunes mariés qui ont le droit de remplir les fonctions de prochain mare de châty. Ces conciliabules reprennent le lendemain et le jour suivant.

Le Mardi Gras on décide d'aller à la recherche des candidats choisis qui ont déjà quitté Failly avant le point du jour, afin
d'échapper aux recherches du mare de châty, du Queulot et de leurs aides, bénévoles, Mais la fuite des candidats n'est
pas restée inaperçue. Il est très rare d'échapper à la surveillance des aides qui avertissent à temps le mare de châty et le queulot et les fugitifs sont ramenés à Failly de gré ou de force.

Dans la soirée du mardi gras, vers 7-8 heures, des jeunes munis de torches de paille et de résine, forment une haie devant le chaucul. Tout le monde est rassemblé devant ce pressoir. Un petit van a été posé à l'entrée sur le sol. Le mare de châty saisit chaque candidat par le bras droit, les gardiens le maintiennent par le bras gauche et les pans de l'habit ou de la blouse, l'entraînent et l'obligent à courir dans la direction du van.
Arrivé à mi-chemin, il jette 5 pièces dans le van en criant : pile ! ou face ! Celui qui marque le plus de points est nommé
nouveau mare de châty. Si plusieurs ont le même nombre de points, ils recommencent à jouer. Le gagnant est acclamé :"ç'at lu, ç'at lu ! (C’est lui). Chaque candidat perdant le jeu est abondamment queulé par le Queulot.

Dès que le nouveau mare de châty est élu, il est conduit chez lui avec le cérémonial d’usage : en tête tambours et
musiciens, l'ancien mare de châty, son successeur est porté, assis sur la palate. Des porte-flambeaux masqués, rangés de chaque côté escortent les mares de châty. Le queulot suit en lui queulant le bas du dos. Entre temps, la femme du Queulot et celle de l'ancien mare de châty se rendent au domicile du nouvel élu. Toutes deux et l'épouse de l'élu se placent sur le seuil et attendent l'arrivée du cortège. Elles ont enduit leurs mains de suie, souhaitant la bienvenue aux arrivants en leur noircissant le visage ou en leur prodiguant des caresses. Entrés dans la chambre de la maison, les hommes donnent encore parfois l'accolade aux trois femmes qui profitent de l'occasion pour les maculer. Ensuite les hommes vont s'essuyer la figure et les mains aux rideaux blancs de la fenêtre ou à la toile blanche des draps ou des rideaux du lit. Toute la troupe du cortège entre petit à petit dans le logis du nouveau mare de Châty afin d'aider à "éroser lè palate".

Lorsque la hallebarde a été arrosée, nombre d'amis vont chercher chez eux quelques bonnes bouteilles de vin, et l'on
continue de boire en jouant aux cartes en attendant le souper que préparent les femmes. Entre temps, le nouveau mare de châty fait une tournée dans le village et va inviter chaque maître de maison à assister au souper. Rentré chez lui, le nouveau mare de châty se joint aux invités, puis on festoie et on s'amuse jusqu'au lendemain matin.
L’élection du Queulot a lieu le premier dimanche de carême, vers 7 h du soir. En vérité le nouveau queulot est choisi par le nouveau mare de châty, d'accord avec l'ancien mare et l'ancien Queulot.

Vient la cérémonie publique où les assistants sont appelés à approuver le choix du nouveau queulot, les deux mares et les deux Queulots doivent avoir appris par cœur un item composé pour la circonstance. Le roulement du tambour invite la population à assister aux cérémonies qui vont se dérouler sur la place publique. A l'extrémité du village, près de la route de Villers-l ‘Orme, un énorme bûcher a été érigé avec les fagots de sarments que les enfants sont allés ramasser dans les vignes du ban. Pendant que la bûle flambe, le queulot, l'ancien et le nouveau mare de châty et le nouveau queulot se sont réunis, entourés des villageois et des villageoises. Voici l'heure des items.
Chaque fois que l'un des trois orateurs termine le récit savoureux d'une anecdote, il s'écrie en montrant le candidat :

 "At ce qu'i ne mérite meu d'ête queulot ?" et l'assistance répond : "Si at ! si at (si est) Queulot ! Queulot !" Comme premier orateur figure l'ancien mare de châty.

Le nouveau mare lui succède, puis c'est à l'ancien Queulot de conter les folies et les bêtises commises par le candidat. Enfin le queulot nouvellement élu répond à ses interlocuteurs. Le débit des items est suivi de la proclamation des vausenates.

Devant la bûle, à tour de rôle, l'ancien mare de châty, le nouveau, l'ancien et le nouveau queulot criaient, suivant la
formule traditionnelle les valentins et les valentines du village :

- Ji donne, ji donne (Je donne)
Eh qui ? eh qui ? (à qui ? à qui ?)
Eh M........., lem'selle......... je set royale vausenate. (Telle fille à tel jeune homme)
ch raicheté en mi-couronne ( il lui achètera une couronne )
etat une tonne de hérangs ( puis une tonne de hareng)
ot i pain blanc (et un pain blanc)
aust large qu'in vent (van) ( aussi un large van)

Tous ensemble : "Hérang! hérang ! hérang !" (Hareng ! Hareng ! Hareng !)

Aux garçons, jeunes ou vieux, et aux veufs sont donnés de futures épouses et, parfois, on profite de cette proclamation
des couples pour assortir malicieusement certaines personnes que l'on veut ridiculiser.
Après les veusanates, les spectateurs rentrent chez eux en commentant les amusements de la soirée. Les jeunes gens se rassemblent à l'auberge et jouent aux cartes aux frais du nouveau queulot. Puis ils reconduisent chez lui le nouvel élu quileur paie à boire.


La coutume du Queulot telle que nous venons de vous la présenter se déroulait encore ainsi dans les années 30.

C'est en 1939 qu'elle prit fin lorsque les Allemands envahirent la France et que les habitants furent expulsés vers la France libre. A leur retour en 1941, la coutume ne fut plus reprise en raison qu'on ne trouvait plus de ravitaillement et que la vie à cette époque était très chère. Mais surtout une partie des habitant de Failly n’avaient pas été expulsés vers la France libre et avait passé les années de guerre au côté d’une dizaine de familles d’agriculteurs Allemands eux aussi déplacé de la Rhénanie et du Palatinat, ils exploitèrent les fermes et les vignes abandonnées de force avec le bétail. On peut comprendre qu’à leurs retours des soupçons planaient sur le village, de toute évidence quelque chose s’était cassé. Le dernier Queulot a prétendu avoir jeté la hallebarde au fond de son puits pour qu’on ne fasse plus la fête, vraie ou pas ?

Personne ne l’a jamais retrouvée.

Le chan Heurlin :

Le seul livre écrit en vers et en patois lorrain.

En 1785, un publiciste messin, Albert BRONDEX, écrit un récit rustique intitulé « Chan Heurlin ». L’intrigue est
située à Vrémy, village d’enfance de l’auteur. En son temps, l’ouvrage fit les délices de ce coin de Lorraine.
Aujourd’hui, il est considéré comme un chef-d’œuvre car c’est l’unique livre de la région écrit en vers et en patois
lorrain.
L'histoire prend place à Vrémy dans le pays messin . Sergent en congé dans ce village, Maurice est amoureux de
Fanchon, la fille de Chan Heurlin, un riche paysan de la commune, avec laquelle il a une liaison qui n'est pas sans
suites. Mais rapidement Maurice est rappelé au régiment avant d'être blessé et laissé pour mort sur une petite île
à la suite d'une expédition. C'est alors que Fanchon, accablée par la tristesse et atteinte par les premières nausées
de la grossesse, raconte toute l'histoire à son père. Celui-ci, afin de lui sauver son honneur, convainc un idiot du nom de Chalat Pouaré de la demander en mariage.
Ensuite, tout se déroule pour le mieux dans l'attente et la préparation de la cérémonie. Mais au cours de celle-ci,
Maurice reparaît en grande forme et fait valoir ses droits pour obtenir la main de Fanchon qui, au même moment,
se sent mal. On apprend en réalité qu'elle est enceinte, poussant le mariage à être reporté. Bien évidemment, la
fin se veut heureuse pour les deux amoureux puisque Maurice obtient la main de Fanchon et l'épouse après que
l'enfant soit baptisé. Chalat Pouaré, quant à lui, ne fait preuve d'aucune rancune pour son mariage manqué
souhaitant même devenir le parrain de l'enfant et lui laisser tous ses biens.

Aujourd’hui encore une rue de Vrémy porte le nom de Rue du Chan Heurlin ainsi que l’école élémentaire de Sainte
Barbe depuis 2019.

Le General Ardant

Le Général Paul-Joseph Ardant , général de brigade du comité des fortifications, officier de la légion d’honneur
commandeur de l’ordre de Saint Grégoire a été propriétaire du château de Vrémy (Nous ne savons pas s’il l’avait fait
construire) il avait également une ferme dans le village au 19 -ème siècle.

C’est sa veuve (Louise-Claire Archdeacon) qui a fait don à la commune de Vrémy de la chapelle Saint Maur qu’elle avait fait construire après la mort accidentelle de son mari à l’âge de 57 ans au polygone de Vincennes, victime d'un accident, lors d'une expérience de tir, en présence du Ministre de la Guerre. Le couple avait deux filles, Jeanne et Alice née à Metz.

La rue principale du village de Vrémy porte aujourd’hui son nom, il repose à Metz au cimetière de l’Est.


Une bien riche histoire, qui continue de s’écrire jour après jour au sein de nos villages.  

Textes et sources Pascal Rouy

 

 

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